Mulette des rivières, Grande mulette, Mulette perlière, Anodonte des rivières… autant de petits noms pour désigner des moules d’eau douce. Discrètes et enfouies dans les sédiments parfois pendant près d’un siècle, elles sont une dizaine d'espèces différentes à peupler les rivières de Nouvelle-Aquitaine. Dénommées également « Mulettes », leurs tailles varient de quelques centimètres à une quinzaine de centimètres pour les espèces les plus grosses. Elles passent pourtant le plus souvent inaperçues pour la plupart des citoyens. Leurs exigences écologiques en font de véritables espèces indicatrices de la qualité de nos cours d’eau au même titre que peuvent l’être les poissons et autres invertébrés aquatiques. Pourtant près de 80 % de ces mollusques sont menacés de disparition et inscrits à ce titre sur les listes rouges mondiale ou nationale des espèces menacées. Les sécheresses récurrentes, la dégradation de la qualité de l’eau et le cloisonnement des rivières sont les principales menaces.
Les Mulettes c'est quoi ?
Les Bivalves en Deux-Sèvres
Les réseaux hydrographiques de la Nouvelle-Aquitaine abritent une grande diversité de mollusques aquatiques. Parmi ces espèces, figurent les mulettes qui sont particulièrement sensibles aux modifications de leurs habitats aquatiques (assec, qualité de l’eau, continuité écologique, …). Les mulettes sont par conséquent de véritables indicateurs de la qualité de nos cours d’eau au même titre que peuvent l’être les espèces piscicoles et à ce titre doivent faire l’objet d’actions de conservation.
Exemple de milieux favorables pour les Mulettes sur la Vonne (gauche) sur l’Argenton (droite) Crédit Photos : Paulin Mercier
Les Bivalves sont des organismes filtreurs, se nourrissant des microparticules en suspension dans la lame d’eau, ils peuvent filtrer pour certains jusqu'à 40 litres d'eau par jours ! Leur présence dans les cours d’eau et étangs améliore donc la qualité de l’eau et diminue la turbidité.
Pour se reproduire, les Bivalves ont besoin de poissons hôtes, sur lesquels les glochidies (sortes de larves) vont venir se fixer au niveau des branchies. Elles vont ainsi rester plusieurs mois, se développant au dépens du poisson, sans pour autant le tuer, et finiront par se laisser tomber lorsque leur développement sera suffisant. La présence de poisson est donc primordiale pour le cycle de reproduction des Bivalves, et selon qu’il s’agisse de la Mulette épaisse ou de l’Anodonte des étangs, les poissons hôtes ne seront pas forcément les mêmes.
Les Bivalves vivent en moyenne quelques dizaines d’années, selon les espèces, l’acidité du cours d’eau et leur localisation géographique. Certaines espèces, comme la Mulette perlière, peuvent vivre jusqu’à 190 ans lorsque les conditions favorables sont réunies.
Espèces régionales et des Deux-Sèvres
Il existe en Nouvelle Aquitaine une dizaine d’espèces de Mulettes, dont la Mulette perlière (Margaritifera margaritifera) et la Grande Mulette (Margaritifera auricularia), fortement menacées et bénéficiant d’importants statuts de protection, ainsi que d’un plan national d’action en faveur de leur conservation.
En Deux-Sèvres, nous connaissons actuellement 10 espèces, et seule la Mulette épaisse (Unio crassus) présente un statut de protection. Cette dernière est très localisée sur quelques cours d’eau de Gâtine, où elle a été découverte pour la première fois en 2020 par Michel Bonnessée.
Excepter cette espèce et l'Anodonte comprimée, les autres espèces sont plus communes et encore bien présentes dans la plupart des cours d’eau des Deux-Sèvres.
Sauvetage de 3 Mulettes méridionales/des peintres dans un bras mort en cours d’asséchement sur l’Egray et Anodonte des rivières filtrant l’eau sur la Viette. Crédit Photos : Paulin Mercier
Sur les 10 espèces, nous pouvons mentionner la présence de 3 espèces invasives, la Corbicule asiatique (Corbicula fluminea), la Moule zébrée (Dreissena polymorpha) et l’Anodonte chinoise (Sinanodonta woodiana). La première est présente dans la plupart des cours d’eau majeurs du département, parfois en quantité impressionnante, la seconde est uniquement connue du marais poitevin bénéficiant des coquilles des bateaux pour se fixer dessus, tandis que la dernière est pour le moment localisée sur la Sèvre Nantaise et dans le marais poitevin. Toutefois, sa présence vient d’être découverte dans plusieurs étangs de Gâtine, sa répartition pourrait être plus importante que nos connaissances actuelles le laissent supposer.
Tapis de Corbicules asiatiques sur l’Argenton et d'Anodonte chinoise sur la Sèvre Nantaise
Une première action de 2020 à 2024 !
Un premier projet mené de 2020 à 2024 porté par France Nature Environnement Nouvelle Aquitaine a eu lieu sur cette thématique. L’objectif de ce premier projet était de mettre en place et d’animer un réseau d’observateurs dans le département pour qu’à terme nos connaissances sur ce groupe indicateur de la qualité des milieux aquatiques soient plus importantes. C'est chose réussie avec plus de 1000 observations collectées pendant ces 3 années de prospections, 6 plongées organisées avec le CODEP79 ou encore 7 formations et animations sur la thématique. A la suite de ce travail mené pendant 4 ans, un Plan Régional d'Actions en faveur des Mulettes de Nouvelle-Aquitaine a pu émerger et permettre ainsi de valoriser ce travail initié en 2020 graçe au financement de la région Nouvelle Aquitaie, de la DREAL et de l'Agence de l'eau Adour Garonne.
Malette pédagogique avec l'ensemble des espèces de mulette présentes en Deux-Sèvres, conçue à l'issue de ces 4 années de programme. @Marc Bruneau
Le PRAM NA, la nouveauté 2025 !
Le Plan régional d'Actions en faveur des Mulettes de Nouvelle Aquitaine (PRAM NA) a été validé par le CSRPN en milieu d'année 2024, grâce à ce PRAM NA, FNE NA a ainsi pu relancer un programme pour les 3 prochaines années de 2025 à 2027 via les financements du Fonds vert, de la DREAL et de la Région Nouvelle aquitaine.
Au sein de ce programme, pendant les 3 prochaines années, différents objectifs seront présents :
1. Poursuivre notre travail d’amélioration des connaissances : sur les masses d’eau lacunaires en données (identifiées dans le PRAM NA), sur des zones où des compléments doivent être collectés pour trouver les populations et notamment les vivantes, poursuivre l’amélioration de la connaissance de l’ensemble des espèces de moules d’eau douce via l’ADNe.
2. Protéger les populations à enjeux identifiées lors des inventaires.
3. Avoir une meilleure prise en compte des mulettes dans les travaux de cours d’eau et d’étangs.
4. Lutter contre les espèces exotiques envahissantes : pour renforcer la recherche sur l’Anodonte chinoise (espèce exotique bien présente dans notre département) afin que l’on puisse identifier ces zones de présence.
5. Poursuivre les formations, animations, plongées et toutes les actions de sensibilisation à divers publics sur la thématique. Par exemple : vous retrouverez chaque année des ateliers d'identification des coquilles de moules que vous avez chez vous ou que nous aurons récoltées durant l’année, afin de se familiariser à l’identification des coquilles.
Pour consulter l'ensemble du PRAM : https://fne-nouvelleaquitaine.fr/system/files/inline-files/2024.06.06%20-%20PAM-NA%20(FNE%20NA)_Vf.pdf
Prospections sur le terrain et atelier d'identification des coquilles. @Marc Bruneau
Si vous souhaitez prospecter avec nous des cours d'eau, participer à l’atelier identification des coquilles, ou encore découvrir plus amplement ces espèces, n’hésitez pas à revenir vers nous : marc.bruneau@dsne.org